Des éclipses, des anges et des Pères du Désert…
Paris-Orly, tôt samedi 11 septembre 2010.
Il est 8h30 et il fait déjà très chaud dans les galeries de l’aéroport. Le vol Air France 6208 qui me transporte aujourd’hui à Nice est prévu pour 10h30.
Le sac sur l’épaule, à peine avais-je parcouru cinquante mètres en sortant de chez moi ce matin, que je vis soudain une Mercedes gris foncé arrêtée en double file : un taxi parisien ! Je l’ai dépassé de quelques pas avant réaliser soudain que c’était mon taxi, un taxi improbable au petit jour et que les anges avaient réservé à mon attention. Qui d’autre ? Le chauffeur est jeune et sa conduite est agréable. Je lui fais un peu la conversation, mais pas trop car je sens qu’il a roulé toute la nuit.
La voiture file sur le Périphérique, tandis que moi qui suis émerveillée par la vie, je tourne encore et encore sur moi-même les bras écartés comme un derviche…
Dans l’avion, je suis placée près du hublot dans l’avant-dernière rangée, en compagnie des bébés et des très jeunes enfants accompagnés de leurs parents. Aucuns pleurs, le voyage se déroule merveilleusement grâce à la douce influence des anges dont je reconnais une nouvelle fois la signature et la présence. Je les en remercie en souriant.
A 14h, je donne un atelier sur les éclipses pour les adhérents de l’association d’Anne-Marie Roussel, « Le Rendez-vous astrologique ». Je suis heureuse à l’idée de partager mes connaissances et mes expériences avec des personnes intéressées par l’astrologie ; je suis très respectueuse aussi de la confiance qui m’est témoignée.
Je m’adresse à un auditoire tous niveaux et le sujet est ardu, encore très peu étudié par les astrologues. Aussi, c’est une sorte de défi que je me lance à moi-même, et puis il y a maintenant cette envie de donner, si forte et impérieuse. Rayonner à partir de mon centre intérieur m’emplit de joie et de bien-être.
L’accueil est chaleureux. Tous les participants me font l’honneur d’être ouverts et attentifs.
Au cours de mon intervention, Anne-Marie me prend en photo, et quelle photo ! C’est elle-même qui me fait la remarque le soir en visionnant les clichés de l’après-midi. Encore un clin d’œil des anges et de mes guides...
La journée s’achève sur un bon repas. Saturée d’impressions, nul besoin de lecture avant de m’endormir. La nuit est douce et profonde.
Dimanche est réservé au farniente sur les îles de Lérins face à la baie de Cannes. Anne-Marie, qui est vraiment une femme de cœur, a la gentillesse de venir me chercher le matin à l’hôtel pour passer la journée avec moi.
Nous accostons sur l’île Saint-Honorat avec la navette de 10h, juste à temps pour assister à la fin de la messe et entendre le chant des moines cisterciens implantés dans ce havre de paix depuis la fin du XIXème siècle.
L’île abrite le plus vieux monastère d’Occident, celui fondé par Honorat d’Arles vers 400-410. Venu vivre ici en ermite comme autrefois Saint Antoine l’Egyptien dans son désert, Honorat fut bien vite rejoint par d’autres hommes désireux comme lui de se retirer de la société pour trouver Dieu. C’est ainsi que l’idéal ascétique des Pères du Désert d’Egypte et de Syrie gagnat l’Occident, c’est ainsi que la règle monachique établie par Saint Pakôme devint l’exemple à suivre pour créer la Fraternité des hommes sur Terre.
Ces « hommes ivres de Dieu », selon l’expression de Jacques Lacarrière, se rappellent à moi aujourd’hui, eux qui me font signe régulièrement depuis trois ans déjà ; depuis un bel après-midi de printemps, au cours duquel j’ai « canalisé » des images et des musiques venues d’Orient inonder mon cœur de leur saisissante beauté.
Quelle folie s’emparait donc de ces hommes, et de ces femmes aussi, qui durant les premiers siècles de l’ère chrétienne laissaient tout derrière eux pour embrasser une vie d’ascèse rythmée par la méditation, la prière et le jeûne ? Ils renonçaient à la "société" afin de créer un autre monde, où l'Art y fait Ciel : le Royaume annoncé par Jésus au début du Ier millénaire, le Royaume du Ciel sur la Terre. Mais pour cela, il fallait comme le Christ mourir et naître à nouveau, après s'être exilé dans le désert.
Au cours de son lent chemin, l’anachorète voyait les signes annonciateurs du ciel, l’intervention des anges dans la vie de l’univers et dans sa propre vie. Dans le dénuement cet homme faisait l’expérience de son double diabolique et de son double angélique avant d’atteindre des états modifiés que l’on nomme apatheia, puis hésychia.
De nos jours, nombreux sont ceux qui guettent les prémices de l’Apocalypse, rejouant ainsi une très vieille histoire. Des hommes et des femmes sont prêts, comme autrefois, à adopter un autre mode de vie en quête de l’Homme nouveau. Loin des valeurs consuméristes, loin de cette vie en réseaux cablés, mais plus près des anges et des miracles qui abolissent le temps profane et ouvrent sur un autre monde où nous sommes contemporains du Christ.
Je repense à mon sujet d’atelier, « Les éclipses, outils d’intégration et de croissance personnelle ». Une éclipse de Soleil, c’est être temporairement coupé de la vie extérieure, de la fausse lumière, c’est « mourir au monde » afin d’opérer un travail intérieur. C’est passer l’épreuve purificatrice avant de s’abandonner au divin dans le noir, avant de renaître au monde plus près de l’Être.
A l’occasion d’une éclipse solaire, le Soleil et la Lune réalisent l’Union sacrée que les Alchimistes appellent le mariage du Roi et de la Reine. Certains peuples d’Orient vénèrent depuis toujours cet événement magique en se purifiant dans les fleuves sacrés et en pratiquant l’union sexuelle en conscience.
La luminosité était belle en ce 11 septembre 2010. J’ai pris quelques photos avec ma caméra, comme ce cliché du « Frioul », ce canal bleu entre les deux îles de Lérins qui soudain me fait tellement penser au canal central de la non-dualité où circule le prana, cette énergie pure et neutre de la conscience primordiale, cette énergie de l’Être…
Illustrations : Isabelle Cantin-Hridaya /2010 Isabelle Cantin - Hridaya / Tous droits réservés / septembre 2010